L’enseignement du journalisme, quelle formation et quelles compétences à développer chez les étudiants ?

octobre 8, 2018 • Articles récents, Derniers articles, Ethique et Qualité • by

Une enquête menée en 2015, auprès de 227 étudiants en journalisme allemands a confirmé que l’enseignement et la formation en journalisme en Allemagne pourraient être améliorés, en particulier en ce qui concerne les compétences techniques et entrepreneuriales. Une étude similaire menée en 2016, en Roumanie, a signalé que les étudiants souhaitent davantage de cours pratiques, liés aux développements actuels dans le domaine du journalisme, et souhaitent davantage travailler avec du matériel technique. Ces exigences des étudiants en journalisme dépendent déjà du contexte médiatique dans lequel nous sommes aujourd’hui en Europe ou dans le Monde Arabe.

En fait, la profession de journaliste a radicalement changé au cours de ces dernières décennies, car la numérisation a obligé les journalistes à acquérir de nouvelles connaissances et compétences. Ce qui a poussé les journalistes professionnels à suivre les innovations technologiques pour bien mener leurs travaux, de façon qu’ils soient adaptés au développement de l’industrie des médias. En parallèle, les enseignants en journalisme ont été ces dernières années mis au défi par l’importance croissante des compétences techniques, notamment le traitement de données, ainsi que par les nouveaux concepts d’entreprise. C’est bel et bien le cas dans les écoles de journalisme en Romanie, en Allemagne, en Portugal et en Hongrie, là où les enseignants se sont trouvés appelés à revoir leurs curriculums pédagogiques.

Dans ce cadre, une étude a été menée sur les compétences journalistiques nécessaires à l’heure actuelle et pour mieux comprendre le statu quo en matière d’innovation dans le journalisme et la formation journalistique dans quatre pays européens : l’Allemagne, la Hongrie, le Portugal et la Roumanie. Cette étude est intitulée « Nouvelles compétences pour la prochaine génération de journalistes ». Elle a été financée par Erasmus et menée par des enseignants en journalisme de l’Université de Pécs (Hongrie), de l’Institut de journalisme international Erich Brost (Allemagne), de l’ISCTE – Institut universitaire de Lisbonne (Portugal) et de l’Université de Bucarest (Roumanie). Elle émane d’un projet qui propose des supports d’apprentissage développés en ligne et qui sont liés à quatre domaines : le journalisme de données, les nouveaux modèles économiques, le journalisme collaboratif et les défis éthiques.

Des entretiens ont été menés avec 25 enseignants en journalisme et 21 journalistes entre février et mai 2018, et une analyse des six programmes de formation en journalisme sélectionnés dans des universités publiques et privées et des universités de sciences appliquées a été faite. Il s’agit d’une étude comparative qui a confirmé que la formation en journalisme ainsi que les progrès du journalisme concernant les quatre domaines sont assez différents dans chacun des quatre pays, mais il existe également de nombreuses similitudes.

En fait, cette étude confirme que le rôle que jouent de nos jours, les journalistes dans le nouveau paysage médiatique en tant que pilier d’informations crédibles et contextualisées et la situation de concurrence qu’ils vivent en présence de plusieurs formes alternatives d’actualités, le journaliste professionnel se trouve appelé à être doté de nouvelles compétences. Ainsi, les opportunités offertes par les technologies numériques, telles que le traitement, l’analyse et la visualisation de grandes quantités de données, ainsi que les coopérations multisectorielles et numériques transfrontalières, ouvrent de nouveaux champs d’activités journalistiques.

Toutefois, cet environnement journalistique est soumis à plusieurs contraintes d’ordres techniques et économiques au point que certaines situations imposent une expertise en matière de sécurité informatique, ainsi que le développement de modèles stratégiques des entreprises médiatiques que soit par les journalistes en personne ou par les entreprises.

De même, à l’ère d’Internet et des médias sociaux les journalistes se sont trouvés confrontés à certains problèmes éthiques qui doivent être traités pour faire face à leurs responsabilités sociales. Les fausses informations et les discours de haine sont devenus des problèmes majeurs dans la sphère publique, au même titre que la dénonciation et le militantisme.

Ainsi en présence d’une quantité énorme de données, il parviendra de renforcer le journalisme collaboratif mais ceci repose sur une stratégie commerciale prévisible et une base éthique solide.

Six recommandations à retenir pour une formation meilleure en journalisme

Certaines recommandations sont à tirer de cette étude, à savoir :

  1. La curiosité, l’esprit critique, la rédaction et la vérification d’informations sont des aspects permanents dont devrait être doté de nos jours, un journaliste.
  2. Les journalistes d’aujourd’hui doivent maîtriser de nouvelles compétences technologiques telles que l’édition de contenu multimédia ou la sécurisation des canaux de communication numériques.
  3. L’enseignement en journalisme ne devrait pas essayer d’inclure et de s’approprier tous les nouveaux développements du secteur, mais d’enseigner les compétences essentielles et uniquement les tendances significatives.
  4. Possibilité d’aborder les questions d’ordre éthique dans le cadre des projets journalistiques ou des activités dans des salles de rédaction.
  5. Il est nécessaire de faire appel à des experts externes car la plupart des enseignants en journalisme n’ont pas d’expérience pratique en matière de journalisme de données et ne peuvent donc pas l’enseigner correctement.
  6. Il est nécessaire de souligner l’importance du journalisme collaboratif pour encourager les étudiants en journalisme à lancer des projets basés sur le financement participatif.

Cette étude a été menée par Tina Bettels-Schwabbauer, Nadia Leihs, Susanne Fengler (EBI), Gábor Polyák, Annamária Torbó, Éva Varga (PTE), Ana Pinto Martinho, Miguel Crespo, Gustavo Cardoso (ISCTE-IUL), Raluca Radu, Antonia Matei, Anamaria Nicola, Marian Popovici, Manuela Preoteasa, Emilia Șercan, Oscar Stănciulescu (FJSC/UB).

Notons ainsi que tout le matériel pédagogique produit dans le cadre de ce projet, sera rendu ouvertement et librement accessible au moyen de licences ouvertes via le site web du projet.

Remarque : Lire l’étude complète via ce lien

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