Depuis le déclenchement du « printemps arabe », Facebook est devenu pour les citoyens des pays arabes y compris la Tunisie, un espace pour discuter les affaires publiques les plus importantes, bien plus les médias traditionnels. Ils ont trouvé ainsi dans cet espace virtuel, un endroit pour exprimer leurs points de vue en toute liberté et dans un cadre démocratique.
Dans ce contexte, le rapport de la Commission des libertés individuelles et de l’égalité remis le 08 juin 2018 par la Commission mise en place par un décret du Président de la République tunisienne M. Béji Caïd Essebsi, le 13 Août 2017, a suscité un débat public aussi bien dans l’espace réel que dans l’espace virtuel. Ce qui a poussé le journaliste Abdessalam Zbidi à entamer une recherche publiée récemment aux éditions « Sutimedia », sous forme d’un ouvrage intitulé « Rapport des libertés individuelles et de l’égalité, le sujet controversé de l’espace virtuel».
Ce rapport a divisé l’Opinion publique tunisienne vu qu’il a soulevé plusieurs sujets tabous notamment la question de l’égalité de l’héritage entre les hommes et les femmes, contrairement à ce qui est prescrit dans le Coran.
Facebook est parmi les médias sociaux les plus utilisés en Tunisie par rapport à d’autres moyens de communication. L’auteur le considère déjà en tant qu’un « moyen» ou un « medium » au sens voulu par le philosophe Régis Debray. Il pense qu’il n’est pas seulement un moyen de transfert d’informations mais également un moyen de réflexion. Comme il a été mentionné dans l’introduction du livre, le chercheur a choisi d’adopter le même processus des auteurs du rapport qui a été publié sur le site officiel de la commission et Facebook, ce qui a contribué à l’évolution des interactions virtuelles.
Il est à noter que l’auteur a eu recours à l’application « Webradar» pour suivre la manière avec laquelle les Tunisiens ont interagi avec l’événement de la remise du rapport par la présidente de la Commission Bochra Belhadj Hamida au Président de la République, à travers Facebook. Il s’agit de 626 000 visiteurs du 08 Juin 2018 au 11 Juillet 2018.
A travers cette étude, le chercheur a essayé de suivre les interactions dans l’espace virtuel de Facebook, à partir du jour de la remise du rapport, le 21 juillet 2018. Le livre contient également les interactions et les commentaires les plus importants et les déclarations des neuf membres de la commission, une enquête sur les avis des membres de la Présidence de la République, du Gouvernement et de l’Assemblée des Représentants du Peuple, les avis des partis politiques, des organisations et des associations, ainsi que les avis d’un certain nombre d’universitaires, de membres de la société civile et de journalistes. Tout le monde a traité le sujet selon une approche philosophique ou religieuse ou en faisant référence à des conventions et à des traités internationaux.
De plus, le chercheur a mis l’accent sur les échanges qui ont eu dans l’espace commentaire de Facebook, au-dessous des publications, auxquels ont participé l’élite de la société dont certains sont pour ce rapport et d’autres sont contre. Prenons comme exemple, l’échange qui a eu lieu entre la Présidente de la Commission Bochra Belhadj Hmida et l’écrivain Habib Bouaajila ou celui entre l’universitaire et écrivain Chokri Mabkhout et le chercheur Sami Brahem. Bien que ces dialogues aient été absents en temps réel, Facebook a attiré l’élite du pays et a enregistré les débats les plus importants sur les libertés individuelles et le rapport d’égalité.
Dans la conclusion de son ouvrage, le chercheur a confirmé que « ce genre de questions et d’enjeux ne peuvent pas être résolus assez facilement, mais il s’agit d’un chemin long et complexe dont le débat se poursuivra sur Facebook » et dans le reste des espaces publics. Il a fini par évoquer une série d’options enregistrées au cours de son action de veille des avis des Tunisiens sur Facebook. Ainsi, les sept options divisent l’opinion entre ceux qui veulent imposer le rapport par force du pouvoir en place et ceux qui sont pour rejeter ce rapport par la force des citoyens. Mais la meilleure option reste le dialogue, selon l’auteur.
De même, l’écrivain a confirmé qu’il a choisi d’éviter les références méthodologiques et théoriques, en se limitant à certains signaux et détails, tel qu’il l’a mentionné dans l’introduction de ce livre : « Ce qui est plus important pour moi c’est l’enregistrement du climat des dialogues et de présenter aux acteurs du pouvoir exécutif et législatif et les élites politiques, scientifiques, culturels et l’ensemble des Tunisiens, une matière à examiner selon différents angles aujourd’hui ou demain ». L’échantillon a été choisi d’une manière aléatoire. Le chercheur a commencé par suivre au départ les commentaires sur la page Facebook de la Présidence de la République. Ensuite, il a suivi celles des membres de la Commission, des journalistes et tous les acteurs qui forment l’opinion publique en Tunisie. Ce qui confirme que le travail sur ce sujet est toujours en cours, en présenced’un échantillon qui doit être analysé d’une manière scientifique approfondie.
Notons que cet ouvrage se compose de 520 pages, dont 180 pages d’ annexes. Quant au plan de l’ouvrage, il s’agit d’une introduction, de huit chapitres et d’une conclusion. Les cinq annexes ont été consacrées aux données , aux communiqués liés au rapport et aux articles de presse les plus partagés sur Facebook.
————-
Abdessalam Zbidi a obtenu une maitrise en philosophie et un mastère de recherche en philosophie des lumières et de la modernité à l’Institut Supérieur des Sciences Humaines de Tunis. Il a travaillé comme journaliste depuis 1994, dans de nombreuses institutions médiatiques écrites et audiovisuelles. Il a été récemment conseiller en information et en communication auprès de la Présidence du gouvernement et du ministère de l’Énergie et des Mines. Il dirige actuellement sa propre agence de communication.
Remarque : Cet article a été publié la première fois sur le site arabophone de l’Observatoire Arabe du Journalisme
TagsCOLIBE, commission des libertés individuelles, Facebook, Interaction, Tunisie