Un bureau de 14 personnes dédiées exclusivement aux médias sociaux, a été mis en place par la chaine Qatarie Al Jazeera, dès la fin de l’année 2011. Le recours aux réseaux de « journalistes citoyens » a été mis en place par cette chaine télévisée, étant donné que les citoyens sont devenus des producteurs de l’information à la faveur des nouveaux supports numériques.
Ainsi, les journalistes professionnels se sont mis à chercher parfois les informations auprès des « journalistes citoyens », ce qui a minimisé par la même les coûts de production de l’information. Déjà, dans certains pays arabes, Twitter et Facebook sont utilisés comme première source d’information, à coût zéro.
Dans son article intitulé « Nouveaux médias et flux d’information journalistique dans le monde arabe : localisation de la production et internationalisation de la consommation », paru dans l’ouvrage « La circulation des productions culturelles : cinémas, informations et séries télévisées dans les mondes arabes et musulmans » aux éditions du Centre Jacques Berque (CJB) et de l’Institut Français d’Etudes Anatoliennes (IFEA), Enrico De Angelis a démontré comment l’émergence des nouveaux médias a transformé les modalités de production, d’échange et de diffusion de l’information dans le monde arabe, à l’échelle nationale aussi bien qu’internationale.
En fait, les révoltes de 2011 ont accéléré le processus de la diffusion de l’informationdans le monde arabe. La scène journalistique a été énormément touchée par l’émergence d’Internet. De nombreuses entreprises médiatiques construites sur l’utilisation d’Internet ont vu le jour notamment « MadaMasr » en Égypte, « Nawaat » et « Inkyfada » en Tunisie, « SyriaUntold » en Syrie ou « 7iber » en Jordanie.
Par ailleurs, les systèmes médiatiques arabes sont devenus des systèmes « hybrides » étant donné que l’information journalistique circule de façon fluide d’une plateforme médiatique à l’autre (télévisions, journaux électroniques et imprimés, réseaux sociaux, blogs, etc.). Ce qui a donné naissance à « un espace partagé, plus participatif, aux contenus produits par le bas et dont les hiérarchies entre les différentes sources d’information tendent à se brouiller ».
Impact des nouveaux médias
L’auteur confirme que les nouveaux médias ont changé les flux d’information transnationale, ce qui a impacté les coûts traditionnellement associés à la diffusion de l’information. Ainsi, « l’ère des correspondants permanents et des envoyés spéciaux réguliers semble révolue, les médias internationaux ayant de plus en plus recours aux journalistes citoyens ou aux journalistes freelance qui vivent dans les pays concernés ».
De plus, si la production de l’information tend à devenir plus locale, la consommation, au contraire, s’internationalise. Elle se propage rapidement via les nouveaux flux d’information aussi bien que sur les anciens supports.
Les grands médias traditionnels tels qu’Al Jazeera, disposant des ressources humaines et budgétaires nécessaires, ont mis en place une équipe dédiée à la recherche et à la vérification de l’information qui circule sur le web. Ceci leur a permis de créer et d’entretenir un réseau de « journalistes citoyens » sur le terrain.
Bien que certains journalistes citoyens ne sont pas payés, d’autres le sont. Or généralement, les journalistes citoyens, payés à l’article, permettent « d’éviter les coûts liés à la gestion d’un bureau ou d’un envoyé spécialsur le terrain ». Donc les médias ont appris selon l’auteur à tirer profit de la contribution du public dans la production des contenus.
De plus, cela permet également de « contourner plus facilement les restrictions de mouvement et d’action qui frappent souvent les journalistes professionnels ». A titre d’exemple, la mobilisation des citoyens ordinaires et des activistes en Syrie vu l’interdiction d’entrée imposée par le régime aux journalistes. Donc ils sont devenus « les principaux fournisseurs d’informations et de contenus vidéo ».
Par la suite, de nombreux projets journalistiques« indépendants » qui diffusent leurs contenus exclusivement sur Interne, sont nés ces dernières années dans le monde arabe. Citons par exemple, « Nawaat » en Tunisie, « MadaMasr »en Égypte, « 7iber »en Jordanie ou « Mamfakinch »au Maroc. Toutefois, ces plateformes ont choisi de se focaliser sur les informations locales en absence des moyens budgétaires permettant de couvrir efficacement l’actualité internationale.
Crédit photo @Geecfi
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