La couverture médiatique en Europe est dominée par des journalistes et des commentateurs de sexe masculin écrivant principalement à propos d’autres hommes, comme le montre une récente étude collective du réseau EJO sur la presse écrite et en ligne.
La prédominance des hommes dans l’élaboration et la couverture de l’agenda de l’information persiste malgré le fait que dans la plupart des 11 pays étudiés, les femmes représentent près de la moitié du nombre de journalistes.
Les chercheurs ont examiné les articles publiés et les images qui accompagnent les articles et ont constaté que dans presque tous les médias étudiés, tant imprimés que numériques, ce sont des hommes qui écrivent l’essentiel du contenu dans les rubriques d’actualité, économie et dans les pièces d’opinion. Dans l’ensemble, 41% des articles avaient été signés par des hommes contre seulement 23% pour les femmes, tandis que près de la moitié (43%) des photos publiées représentaient uniquement des hommes, contre 15% seulement des femmes.
Les femmes perdantes dans l’imprimé et le numérique
L’étude révèle que le déséquilibre entre les sexes tend à être plus prégnant dans les médias imprimés traditionnels que chez leurs concurrents en ligne. Globalement, les médias numériques peuvent se targuer d’une répartition légèrement plus égalitaire, toutefois chez eux aussi une majorité des contenus sont signés par des hommes masculins et les photographies représentent davantage d’hommes. Dans certains pays et médias, un plus grand nombre d’articles était signé par des agences anonymes que par des reporters féminins.
Les pays où le plus grand déséquilibre entre les sexes a été constaté sont l’Italie et l’Allemagne. En Allemagne, 58% des signatures étaient masculines et seulement 16% féminines, tandis qu’en Italie, 63% des signatures étaient masculines (le pourcentage le plus élevé parmi les 11 pays) et seulement 21% féminines. Le reste était composé d’articles sans signature et/ou d’agence.
Le pays le plus inégal en termes d’utilisation de photos était l’Ukraine, où 49% des images ne représentaient que des hommes, contre 10% qui ne représentaient que des femmes.
La seule exception à la suprématie masculine était le Portugal, où les signatures féminines étaient plus fréquentes que celles des hommes : 31% contre 20%. Mais même ici, l’utilisation de photographies d’hommes a éclipsé celle des femmes, avec 49% contre 12%.
Pays | Hommes dans la profession | Femmes dans la profession | Articles signés par hommes | Articles signés par femmes | Photos d’hommes seulement | Photos de femmes seulement |
Total 11 pays | – | – | 41% | 23% | 43% | 15% |
Rép. Tchèque | 57% | 43% | 41% | 19% | 37% | 13% |
Italie | – | – | 63% | 21% | 42% | 11% |
Allemagne | – | – | 58% | 16% | 44% | 22% |
Lettonie | – | – | 32% | 13% | 44% | 9% |
Pologne | – | – | 37% | 24% | 39% | 14% |
Portugal | 58% | 48% | 20% | 31% | 49% | 12% |
Roumanie | – | – | 54% | 36% | 45% | 16% |
Espagne | – | – | 39% | 21% | 45% | 21% |
Suisse | 49% | 51% | 38% | 16% | 42% | 11% |
Ukraine | – | – | 33% | 28% | 49% | 10% |
Royaume Uni | 55% | 45% | 41% | 29% | 36% | 28% |
Méthode
L’étude, menée par l’Observatoire européen du journalisme (EJO), est basée sur une analyse systématique des rubriques actualité, économie et commentaires de deux journaux imprimés et de deux médias numériques dans chaque pays, deux jours par semaine pendant quatre semaines en janvier et février 2018. Les pays inclus dans l’étude sont la République tchèque, l’Allemagne, l’Italie, la Lettonie, la Pologne, le Portugal, la Roumanie, l’Espagne, la Suisse, l’Ukraine et le Royaume-Uni.
Afin d’uniformiser la récolte des articles, seules les 15 premières pages de chaque journal imprimé ont été prises en compte, en partant du principe qu’elles présenteraient les articles les plus importants de la journée. Pour les médias numériques, les 20 premiers articles affichés sur la page d’accueil et se rapportant aux rubriques actualité, politique et économie, ont été choisis. Les articles relevant d’autres domaines comme la culture, la santé, ou le «lifestyle» ont été omis, tout comme les sections sportives.
Les résultats ont provoqué un certain désarroi parmi les femmes journalistes à travers l’Europe, dont certaines attribuent le déséquilibre à une culture fortement ancrée dans les salles de rédaction, perçue comme machiste et exigeante, en particulier en termes d’horaires longs et peu compatibles avec une vie familiale.
La professeure Suzanne Franks, directrice du département de journalisme à la City University de Londres et auteure de plusieurs études historiques sur les femmes dans le journalisme, a déclaré que l’étude mettait en évidence des inégalités de longue date dans le journalisme.
«Une étude aussi vaste et complète comparant les disparités entre les sexes dans autant de pays, c’est une très bonne chose. Ce qui est moins réjouissant, c’est la persistance des disparités au sein de ceux qui sont publiés et de ceux qui figurent dans les images d’actualité. Espérons qu’en soulignant une fois de plus ces disparités sexuées dans le journalisme, nous verrons surgir des efforts concertés en vue d’un changement».
Remise en question souhaitée
Susanne Klingner, journaliste allemande au bénéfice d’une longue expérience dans le domaine de l’égalité, avec notamment la création de Plan W, un magazine économique pour les femmes de la Süddeutsche Zeitung, n’est pas surprise des résultats concernant l’Allemagne: «Dans toutes les études de l’OCDE, l’Allemagne se situe au bas de l’échelle en ce qui concerne l’équilibre entre les sexes. J’aimerais pouvoir affirmer que ce mauvais résultat est dû au choix des médias d’information puisqu’il l’étude n’a pas inclus de titre progressiste comme SZ ou Die Zeit, mais je crains que cela n’aurait pas changé grand-chose.» Selon Klingner, l’amélioration de l’équilibre entre les sexes n’est pas encore un impératif commercial en Allemagne, malgré les tentatives de certains journaux, comme Die Zeit, d’améliorer le ratio entre le personnel masculin et féminin. «95% des journaux allemands sont dirigés par des hommes.»
«J’ai vu cela tant de fois. Les jeunes professionnels au sein d’un média ne sont pas jugés sur leur performance, mais sur des sentiments et les vieux journalistes masculins blancs (un autre aspect du manque de diversité en Allemagne) se sentent proches des jeunes journalistes masculins blancs. Ils se voient eux-mêmes quand ils débutaient et favorisent leur promotion. Beaucoup de jeunes femmes restent invisibles, aussi talentueuses soient-elles. Elles n’ont tout simplement pas le même nombre de soutiens dans l’entreprise. Le jour où il y aura suffisamment de femmes dans les postes de direction, cela va changer… L’échec des entreprises de presse est qu’elles pensent qu’être progressiste signifie avoir une ligne éditoriale progressive, mais pas nécessairement être une entreprise progressiste. Quant aux entreprises conservatrices, elles ne s’en soucient pas.»
***
Les chiffres pays par pays
- République tchèque
Les journaux nationaux tchèques et les principaux sites d’information en ligne sont largement dominés par les hommes, à une exception notable près. Dans l’ensemble, les journalistes masculins ont signé 41% de tous les articles de journaux, contre 19% pour les femmes. Cet écart se creuse davantage s’agissant des commentaires (90% d’hommes) et des rubriques économie et finance (80% d’hommes).
Cela s’observe en dépit du fait que les femmes sont plus nombreuses que les hommes à suivre des cursus universitaires de journalisme ; à l’Université Charles de Prague, l’un des quatre programmes de journalisme en République tchèque, il y a eu plus de femmes que d’hommes candidats au cours des cinq dernières années. Cette année, 217 femmes sont inscrites contre 168 hommes.
Seul Seznamzpravy.cz, un site d’information numérique de premier plan, renverse la tendance. Lancé en 2016, il publie davantage d’articles écrits par des femmes pendant la période étudiée (53% de signatures féminines contre 40%). Sur une journée, Seznamzpravy.cz a publié 12 articles signés par des femmes contre cinq par des hommes ; le même jour, Aktuane, un autre site d’information en ligne, comptait 2 articles écrits par des femmes et plus de 12 par des hommes ; MF DNES, un journal national centriste, respectivement 5 et 12 ; Pravo, un quotidien national considéré comme étant à gauche, respectivement 3 et 26.
S’agissant des photos, tous les médias étudiés ont publié trois fois plus d’images montrant des hommes. Sur les photos, les femmes, elles, sont généralement montrées dans des situations de la vie quotidienne normale, alors que les hommes sont généralement représentés dans le rôle de politiciens ou d’experts (148 hommes politiques comparés à 26 femmes politiques ; 21 hommes experts comparés à six femmes expertes). La surreprésentation fréquente des politiciens peut s’expliquer par le fait que moins de femmes entrent en politique (par exemple, il y a seulement 22% de députées). Certains jours, dans certains médias, il y a jusqu’à 10 photos d’hommes et aucune de femmes. A d’autres occasions, les principales photos de femmes publiées représentent des femmes légèrement vêtues du carnaval de Rio.
- Allemagne
En Allemagne, la couverture de l’actualité est en grande partie une affaire d’hommes. Dans l’ensemble, si l’on considère les quatre médias étudiés, les hommes représentent 58% des signatures et les femmes seulement 16%; tandis que 43% des photographies publiées montrent des hommes, et seulement 22% des femmes. Ceci dans un pays où le chancelier est une femme, et où une autre femme vient juste d’être élue à la tête des sociaux-démocrates.
Dans la Frankfurter Allgemeine Zeitung (FAZ), journal conservateur avec un faible taux de rotation du personnel, 81% des articles sont signés par des hommes et 13% par des femmes. Ils dominent les articles économiques et politiques quand elles se cantonnent surtout aux rubriques arts et culture. Concernant l’iconographie, la situation est similaire: 38% d’hommes seulement, comparativement à 14% de photos montrant des femmes.
Dans le Bild, plus grand tabloïd du pays, à tendance conservatrice également, la distribution des signatures reste fortement masculine (39% contre 14%). De plus, les photos représentent le plus souvent les femmes dans des contextes sexualisés, par exemple en bikini, ou en tant que petites amies ou épouses d’athlètes et d’acteurs célèbres.
Bento, un site d’information qui s’adresse à un public plus jeune et plus libéral, obtient des résultats plus égalitaires. Dans ce média qui traite fréquemment de thématiques progressistes, comme le genre, les droits des femmes ou le racisme, 38% des articles sont signés par des femmes, contre tout de même 58% par des hommes. Les photographies de femmes représentent 27% du total, contre 36% pour les hommes.
Sur T-online, en revanche, les signatures féminines ne représentent que 5% du total, contre 27 % de signatures masculines; tandis que 46% des photos montrent des hommes et 23 % des femmes.
- Italie
Dans les quatre médias italiens étudiés, les hommes sont surreprésentés à la fois dans les signatures et sur les photos, et sur tous les jours observés, à la fois en ligne et sur papier. Sur un total de 594 signatures, 373 sont masculines (63%) et 123 féminines (21%). En termes d’iconographie, les hommes sont représentés dans 42% des images contre 12% pour les femmes.
Dans La Repubblica, quotidien de centre-gauche, les femmes sont représentées sur seulement 4% des images, contre 33% pour les hommes. 68% des articles sont signés par des hommes et 28% par des femmes. La même disparité demeure dans le Corriere della Sera, un journal de centre-droit: 74% de signatures masculines contre 23%, et 43% de photos montrant des hommes contre 16% de figures féminines.
Les mêmes tendances s’observent également dans les deux médias digitaux étudiés, Linkiesta.it(67% contre 15% pour ce qui est des signatures, et 46% contre 13% concernant les photos) et HuffPost.it (35% de signatures masculines contre 16%, et 42% de photos d’hommes contre 11%.)
- Lettonie
Le journalisme en Lettonie a toujours été une profession à prédominance féminine, mais seulement 13% de tous les articles des quatre médias étudiés – Latvijas Avize, Segodna, Delfi et Tvnet – sont signés par des femmes (32% par des hommes).
De plus, une grande partie des articles ne peuvent être attribués à un auteur (54%), soit parce qu’ils ne sont pas signés (30%), soit parce qu’il s’agit de dépêches d’agences internationales ou nationales (24%). Moins de 10% des photos présentent uniquement des femmes, et 44% des images montrent seulement des hommes.
Dans Segodna, un journal de langue russe de type tabloïd, 85% des articles sont rédigés par des hommes et seulement 14% par des femmes. Dans Latvijas Avize, un quality paper, le ratio est de 34% contre 18%. Quant aux médias digitaux, la répartition y est plus équilibrée: sur Delfi, la source d’information en ligne la plus populaire du pays, seuls 6% des articles sont écrits par des hommes, alors que 19% sont signés de journalistes femmes.
Dans tous les médias, les photos représentent en majorité des hommes ; un des titres ne montre des femmes que dans 11% des images publiées.
- Pologne
Sur la totalité des titres étudiés, une grande majorité des articles sont signés par des journalistes de sexe masculin (37%), contre 24% par des journalistes de sexe féminin. Il est intéressant de noter que la proportion d’articles non signés ou d’agence (35% de l’ensemble) dépasse le nombre d’articles signés par des femmes.
Le site d’information numérique Wp.pl n’est pas loin de la parité: 40% de ses articles ont été créés par des femmes contre 58% par des hommes. Vient ensuite le journal Gazeta Wyborcza, seul quotidien de gauche ouvertement favorable à l’égalité des sexes en Pologne, avec 55 % des contenus signés par des hommes contre (seulement) 33 % par des femmes.
Sur Onet.pl le contenu rédigé par des femmes représente 16 % du total, tandis que les hommes signent 27% des articles, la majorité des contenus (56%) provenant d’agences ou d’autres médias sans signature.
Dans le tabloïd à grand tirage Fakt (RASP), la répartition est plus égalitaire : 10% d’articles écrits par des hommes contre 9% par des femmes, mais une grande proportion de contenu sans signature (80%).
Il n’y a pas eu un seul jour au cours de la recherche où le nombre de photos représentant des femmes a dépassé le nombre de photos représentant des hommes. Dans l’ensemble, les hommes figurent sur 39% de toutes les photos, contre 14% pour les femmes. Dans certains cas, des sujets sur des femmes politiques sont même illustrés par des photos représentant des hommes mentionnés dans l’article.
- Portugal
Le Portugal fait figure d’exception. Sur les quatre médias analysés, la proportion de signatures féminines (30%) dépasse le nombre de signatures masculines (20%). Ce phénomène est encore plus fort s’agissant des journaux imprimés : 37 % des articles écrits par des femmes, contre seulement 18% par des hommes.
Sur les médias digitaux, en particulier chez Notícias ao Minuto, près de la moitié des contenus sont des dépêches d’agence. Le reste est divisé ainsi de façon assez paritaire : 22% des articles écrits par des hommes et 24% par des femmes.
La prévalence des signatures féminines dans les médias étudiés est une surprise, dans la mesure où le Portugal compte davantage d’hommes journalistes (52%) que de femmes journalistes (48%) selon une enquête récente. Cela pourrait s’expliquer par le fait que les hommes occupent des postes plus élevés dans la hiérarchie, sans charge de rédaction mais plutôt dans des rôles de direction ou d’édition. En 2017, lors du Congrès annuel des journalistes portugais à Lisbonne, seuls deux des 19 panélistes, représentant la direction des principaux médias, étaient des femmes.
- Roumanie
Hotnews.ro, l’un des sites d’information en ligne roumains les plus populaires, fait aussi figure d’exception (avec le Portugal) dans le paysage médiatique européen, avec plus de la majorité de ses contenus (57%) signés par des femmes, contre 43 % par des hommes.
Dans le quality paper Adevarul, 44% des articles sont rédigés par des hommes contre 38% par des femmes. Le contenu de la rubrique internationale est entièrement signé par des femmes sur la période étudiée, même si les articles publiés en une du journal sont en général écrits par des hommes (ce qui s’observe aussi chez Libertatea). On note également que les articles écrits par des femmes journalistes sur Hotnews et dans Adevarul sont généralement beaucoup plus courts que ceux écrits par leurs confrères.
Sur la totalité des titres roumains étudiés, la répartition des signatures est de 54% d’hommes pour 36% de femmes, bien que sur stiripesurse.ro, la proportion de contenu crée par des hommes se monte à 83%, contre 17% par des femmes
Pour ce qui est de l’iconographie, la totalité des médias étudiés ont tendance à publier davantage de photos d’hommes seuls (45% des photos publiées), et moins de photos de femmes (16%).
- Espagne
Les hommes dominent le paysage médiatique espagnol, bien que plus de la moitié des journalistes du pays soient des femmes. Dans l’ensemble, 39% des articles analysés sont rédigés par des journalistes masculins, contre 21% par des femmes. Certains jours, cette proportion atteint plus de 80%.
S’agissant des photos, 45% ne mettent en vedette que des hommes, quand 21% ne montrent que des femmes. Dans les éditions imprimées des journaux El Mundo et El País, la taille des photos montrant des femmes a tendance à être nettement plus petite que celle des portraits d’hommes.
Dans El País, la répartition des signatures est la moins égalitaire (65% d’hommes contre 28% de femmes), tandis que sur HuffPost, elle est de 13% d’hommes contre 8% de femmes, avec un nombre élevé d’articles mixtes.
- Royaume-Uni
Quatre médias ont été étudiés au Royaume-Uni, dont deux imprimés : The Daily Telegraph, un titre de référence, The Sun, un tabloïd populaire, et deux sites numériques, Buzzfeed et International Business Times.
Dans The Sun, 40% des signatures sont masculines – les femmes n’ont écrit que 12% des articles pendant la période étudiée. Cela se reflète sur le contenu, comme l’indiquent les choix iconographiques. Alors qu’il y a une proportion relativement élevée de femmes apparaissant seules sur les images, elles sont en majorité peu vêtues ou, alors réprimandées pour être apparues sans maquillage. Le Sun est connu – et l’assume sans complexes – pour sa page 3 montrant des photos de femmes.
Le Telegraph publie davantage d’articles féminins (33,5%) que d’articles masculins (28%). Au cours de la période étudiée, le titre s’est fermement positionné en matière d’égalité, notamment dans le cadre d’articles, rédigés par des femmes, critiquant les inégalités salariales à la BBC (février 2018).
Cependant, le 28 mars, quelques semaines après la période analysée dans cette présente étude, le Telegraph a révélé que son propre écart de rémunération entre les sexes était le plus élevé de tous les éditeurs et diffuseurs du Royaume-Uni ayant publié leurs chiffres officiels. Les femmes qui travaillent pour le Telegraph Media Group (TMG) sont payées 35% de moins que les hommes en moyenne. Le groupe s’est récemment engagé à réduire l’écart à zéro d’ici 2025.
Selon l’UCAS, l’organisme britannique chargé des admissions à l’université, les femmes sont plus nombreuses à fréquenter les écoles de journalisme entre 2007 et 2014. En revanche, en dépit du nombre plus élevé d’inscriptions émanant de femmes, les hommes sont admis en plus grande proportion.
Bien qu’il y ait une part relativement élevée de femmes dans la profession (45% des journalistes britanniques), elles sont moins bien rémunérées et sous-représentées dans les postes de direction, selon une étude réalisée en 2016 par le Reuters Institute/Worlds of Journalism.
Les médias imprimés (The Sun, The Telegraph) ont été choisis pour complémenter une étude récente d’EJO qui portait sur d’autres médias imprimés du Royaume-Uni, cependant les résultats de cette étude s’avèrent presque identiques.
- Ukraine
Dans la presse écrite, les femmes journalistes sont représentées à parts égales. Sur les deux journaux analysés, l’un affiche davantage de signatures féminines que masculines, tandis que la parité s’observe dans l’autre. Dans Segodnya, un quotidien de masse, la proportion de signatures féminine est de 51% contre 40% sur la période étudiée. Dans Den, un quality paper, chaque sexe est représenté dans 37% des signatures.
Le résultat est sensiblement différent s’agissant des sites d’information en ligne. Une majorité de signatures masculines s’observe dans les deux cas: elle est de 24% contre 13% sur Censor, un site d’information qui pourrait être considéré comme patriotique, et de 29% contre 10% sur Obozrevatel. Sur l’ensemble des quatre titres analysés, les hommes représentent donc 33 % des signatures, comparativement à 28% pour les femmes.
Ces résultats doivent être replacés dans un certain contexte. Les médias en ligne ukrainiens ne mettent généralement pas de signature d’auteur sur les articles d’actualité, car une quantité considérable de contenu est simplement réécrit à partir d’autres sources (autres sites d’information, agences de presse, etc.). Même les contenus exclusifs sont généralement non signés. Cela peut masquer la réalité.
Concernant le recours aux images, dans l’ensemble, 49% des photos sont des photos d’hommes seulement, comparativement à 10 % qui mettent en vedette des femmes. Comme pour les signatures, les journaux imprimés sont davantage paritaires que les médias digitaux. Alors que 15% des photos de Den et 17 % de celles de Segodnya montrent des femmes, c’est le cas de seulement 7% et 6% de celles utilisées à Censor et à Obozrevatel. Cela s’explique en partie par l’actualité : la majorité des reportages ont tendance à être consacrés à des personnages masculins (hommes politiques, hommes d’affaires, soldats, etc.) alors que les personnages féminins sont moins fréquents et moins visibles. Ce résultat reflète la situation générale du pays où les femmes sont encore fortement sous-représentées en politique (seulement 12% de députées).
- Suisse
Pour cette étude, deux publications en allemand (le quotidien de référence Neue Zürcher Zeitunget le site d’information Watson) ont été examinées, ainsi que deux en français (le quotiden lémanique Le Temps et, en l’absence de pure-player romand, le site d’information du radiodiffuseur public RTS Info).
Comme dans la plupart des autres pays d’Europe, les signatures des publications de ces quatre médias sont majoritairement masculines : des hommes ont signé 38% de l’ensemble des articles étudiés, les articles signés avec des agences viennent ensuite (27%), tandis que les journalistes femmes n’en signent que 16%. De légères différences ont été relevées entre les médias francophones et germanophones (28 % de signatures d’hommes comptées contre 15% de femmes dans les médias francophones et 39 % contre 14 % dans les médias germanophones). Mais les différences entre les deux langues sont quasi-inexistantes au niveau des photos. Les médias en ligne présentent un écart beaucoup plus faible entre les hommes et les femmes pour les signatures d’articles (19% pour les hommes et 11% pour les femmes) par rapport aux journaux papier, où près de la moitié des articles (48%) ont été écrits par des hommes, tandis que les femmes n’ont fourni qu’environ 18% des articles.
La relative absence féminine dans la signature d’articles se reflète également au niveau visuel : dans l’ensemble, seulement 11% des photos montrent exclusivement des femmes, alors que les hommes sont exclusivement représentés dans 42 % des photos. Les 47 % restants ne montrent ni l’un ni l’autre ou des protagonistes des deux sexes simultanément. Si l’on considère les deux types de médias séparément, les différences restent légères. Dans les médias en ligne, une minorité d’images montraient uniquement des femmes (10%), alors que la plupart d’entre elles ne représentaient ni l’un ni l’autre (53%) ou des hommes (37%). Dans les médias imprimés, plus de la moitié de toutes les photos montraient des hommes (55%), tandis que 32% représentaient les deux sexes ou aucun des deux, et les femmes étaient également légèrement plus représentées mais encore faibles (13%).
Il faut relever que ces constats ont parfois déjà été faits au sein des rédactions. L’équipe numérique du Temps avait par exemple quantifié la présence féminine dans ses colonnes en 2017, et pendant que EJO compilait les présentes données, Jean Abbiateci s’est livré à nouveau à un exercice similaire dont il rend compte dans une série de tweets.
Cette étude a été menée collectivement par le réseau EJO en particulier Ana Pinto Martinho, Paulina Pacula, Rachel Stern, Felix Simon, Caroline Lees, Georgia Ertz, Philip di Salvo, Līga Ozoliņa, Sandra Štefaniková, Antonia Matei, Dimitrina Jivkova Semova, Halyna Budivska et David Gerber. Adaptation en français par Pauline Cancela et David Gerber, AJM. Crédit photo: Bureau de presse du Kremlin.